Rapidité de jeu et réalisation du clavier

Ce qui suit résulte d'une remarque très pertinente de mon "prof de vielle", essayant de me faire comprendre pourquoi tel clavier, dans l'état, ne permettait pas de jouer vite... et donc condamnait mes tentatives pour améliorer mon jeu dans ce sens.
Dans le cas cas, comme dans d'autres, la connaissance approfondie qu'il a de l'instrument est riche d'enseignement.
Qu'il en soit ici remercié.

Génération de sons par action de la roue

Les sons sont émises par le frottement de la roue :
- sur les bourdons,
- sur la/les chanterelle(s).
Une chanterelle (cordes ayant pour fonction de produire le chant - en d'autre terme de jouer la mélodie) peut être jouée
- à vide, et dans ce cas elle émettra le son le plus grave déterminé par l'accord de la corde (en fonction de la matière, de la grosseur, de la tension),
- sur une longueur vibrante raccourcie par pression d'un doigt sur une touche.

Eléments constitutifs d'une touche

dessin d'une touche La zone marquée Touche sur le dessin correspond à l'organe qui permet l'appui d'un doigt.

La zone marquée tangente ou tige de touche assure la continuité entre la touche et les sautereaux. La tangeante coulisse perpendiculairement à l'axe du clavier.

Les sautereaux sont les organes qui viennent presser les chanterelles. 

Action d'un seul sautereau sur une seule chanterelle

Afin de simplifier les explications (et les figures qui les accompagnent) on va considérer qu'il n'y a qu'une seule chanterelle.
On considérera également que la chanterelle est entrée en vibration.

formation des notes En 1, le sautereau est éloigné de la corde vibrante. Celle-ci émet la note à vide.

En 2, le sautereau est entré en contact avec la corde vibrante. Dans ce cas, la longueur vibrante de la corde se trouve réduite et la corde émet une note plus aigue que dans le cas 1.
Si le doigt qui presse sur la touche se relâche, le sautereau va retourner à la position qu'il occupait en 1, par action de la gravité (en supposant que le clavier soit orienté de façon à permettre à celle-ci de s'exercer dans le bon sens).

Remarque sur la rapidité du retour de la posision 2 à la position 1

principe du ressort Quand un doigt exerce une pression sur une touche, le sautereau  avance en direction de la chanterelle. La touche revient d'autant plus vite, après relâchement de la pression, qu'un effet de ressort s'exerce sur le sautereau (ou sur la tangente).

Augmenter la rapidité du retour de la touche

On peut imaginer plusieurs dispositifs :
- Utilisation d'un vrai ressort pour chaque tangente. Cette solution  augmente le nombre de pièces nécessaires à la réalisation du clavier. Elle augmente d'autant les réglages et ajustements. Elle peut augmenter aussi les bruits parasites.
- Utilisation de l'effet de ressort induit par la tension de la chanterelle.

Explication de cet effet

Les dessins ci-dessous sont la continuation des figures marquée 1 et 2 ci-dessus. Le lecteur est invité à s'y reporter.
Dans le cas du dessin 2, l'effet de ressort est quasi-nul, le sautereau étant juste en contact avec la chanterelle.
ressort plus fort En 3, la pression sur la touche est un peu plus forte que nécessaire pour l'obtention de la note. Il s'ensuit que la corde, plus tendue, agira comme un ressort sur le sautereau.

En 4, la pression a été encore augmentée et l'effet de ressort sera plus fort.

Inconvénients liés aux choix 3 ou 4

Une pression plus forte sur la touche se traduit par une surtension de la chanterelle, ce qui a pour effet de générer une note plus aigue que celle que l'on aurait obtenue en 2. Il faut donc régler par anticipation son clavier de façon à ce que la note soit juste pour la pression que l'on compte utiliser  : 2, 3 ou 4.
Exemple : si la note est juste pour le choix 3, elle ne le sera pas tout à faut pour 2 (trop grave) ou 4 (trop aigu).
Il faut s'entraîner à jouer en appuyant plus fort sur chaque touche qu'il n'est nécessaire... et cela en ne perdant pas sur la rapidité d'exécution. Cela n'est pas facile.

Contraintes pour la réalisation de la lutherie consécutives aux choix 3 ou 4.

Dans les explications ci-dessus, on n'a considéré qu'une seule chanterelle et qu'un seul sautereau par tangente. Dans la réalité, ce nombre est fréquemment 2, 3 voire plus.
La grande difficulté qui est générée alors est qu'il faut que les chanterelles rajoutées ne nuisent pas à l'effet de ressort
.
Il y a pire, et c'est plus subtil (et plus difficile à comprendre).
Une chanterelle active transmet sa vibration au sautereau, mais aussi à toute la touche. Si un sautereau de cette touche entre en contact avec une corde inactive, celle-ci va agir comme amortisseur de la vibration : le rendement de la corde vibrante va être amoindri.
Le luthier n'a pas ici la tâche facile. Il suffit d'essayer de jouer très rapidement une séquence de notes sur un clavier de vielle pour ce rendre compte que "tous ne sont pas égaux".
Les musiciens ont tendance à reporter toutes leurs difficultés de jeu sur le dos des luthiers...
Ceux-ci font (parfois aigrement) remarquer que si leurs clients travaillaient un peu plus la technique, ils tireraient plus de profit de l'instrument (remarquable) qu'ils ont réalisé.
Sans vouloir trancher au profit de l'un ou de l'autre, je suis tenté de d'écrire que chacun a une part de responsabilité.

Ce qui suit va essayer de faire comprendre pourquoi certaines touches ne reviennent pas bien, et comment on pourrait améliorer les choses.

Principe de l'amélioration


ecart des chanterelles Le dessin A montre la situation usuelle : la chanterelle est écartée et soulevée de façon à ne pas frotter sur la roue







Le dessin B montre une solution qui, en écartant la corde par les deux bouts améliore les choses. Dabns ce cas, un effectue une seconde entaille dans le sillet et on y insère la corde que l'on veut écarter.



Le dessin C montre une solution moins bricolée : un levier agit à la fois sur l'écarteur et sur une griffe de façon à désactiver la corde en une seule opération.
 A suivre.